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Les Gurungs

Ils représentent 2,4% de la population du Népal, soit +/- 543 000 habitants. Ils se nomment dans leur langue, Tamu-Maï.

Leurs origines

Les origines des Gurungs ne sont pas claires et ont donné lieu à plusieurs hypothèses :

- D’après les Pe (traditions orales Gurungs)


L’origine des Tamu remonterait à 8000 ans dans le village de Cho Nasa en Mongolie occidentale. Plus tard ils se dispersèrent vers les provinces de Qinghai, Kansu, Sishuan et Yunnan. Dans ces deux dernières provinces habitent aujourd’hui encore les peuples Tu et Naxi, deux des neufs clans des Tamu.
Vers le début de notre ère, ils s’installèrent au Mustang (un lien avec les Thakali ?), et traversèrent le Thorong La vers l’an 500, au cours d’une partie de chasse. Ils semèrent quelques grains d’orge qui donnèrent une bonne récolte lors de leur passage suivant et ils décidèrent de s’installer dans le village de Khola Swome Toh, dernier endroit où ils vécurent unis.
Plus tard ils s’installèrent au sud des Annapurna, plus fertile que le Haut Himalaya, et progressivement se diffusèrent vers Lamjung, Kaski et Gorkha. Vers le 16ème siècle, ils tombèrent sous la domination des populations Thakuri, puis Khas. L’influence hindouiste des régnants donna naissance à une notion de division hiérarchique (imitation des castes) au sein des Gurung.
Les noms des 4 clans supérieurs sont Ghale, Ghotane, Lama, et Lamichane (ou bien Kle, Kon, Lama, Plon), ils étaient peut-être les rois, conseillers, prêtres et percepteurs de la société Gurung.

- D’après les Ghale Gurungs

Un roi de la dynastie solaire de Bharadvaja déshérita son fils aîné au profit du cadet. L’aîné s’exila avec sa femme, suivi de leur brâhmane et de sa femme, ainsi que de nombreux esclaves.
Durant leur périple, ils durent partager le toit avec deux prostituées qui profitèrent de leur sommeil pour couper leur janai et leur verser du vin sur les lèvres. Au réveil, les deux hommes (le Gurung et le Brâhmane) croyant avoir fauté pendant la nuit, se firent basse caste. Ils libérèrent leurs esclaves et mangèrent même leur nourriture.
La femme du prince donna naissance à 3 fils (Ghale, Ghodane, et Lama) et la femme du brâhmane à 2 fils (Lamechane) et 3 filles, ancêtres originels des 4 clans supérieurs (chaar jaat) des Gurungs.
La femme de l’esclave donna naissance à 10 filles et 16 fils (qui se marièrent et se reproduisirent entre eux), ancêtres originels des 16 clans inférieurs (sorah jaat) des Gurung. Les origines des Gurung seraient inclues dans les Vamsavali, généalogies hindouisées que possèdent certaines familles Gurung, généralement chez les Ghale Gurung, majoritairement hindouistes.

- D’après les Kirants

Le fils aîné d’un Kirant, après avoir voyagé en Chine et au Tibet, revint aux frontières nord de l’Inde où l’un des fils, Gurupa, fonda les Gurung. Ces textes viennent de l’est du pays.

En résumé

Bien que leurs origines soient incertaines, on sait qu’ils arrivèrent du plateau tibétain par les cols de basse altitude du Mustang. Ceci est attesté par leur religion teintée d’animisme, ainsi que leur Lhosar (nouvel an bouddhiste) au mois de décembre, 2 mois avant celui tibétain.

Étymologie du nom Gurung

D’après les Kirant et selon leur tradition orale «Mundhum», le terme Gurung (venant du tibétain) viendrait d’une confédération de 9 (Gu-) chefs (-rong) dans la région de la Gandaki. Une seconde hypothèse avance que le terme Gurung signifierait “peau de vache??? (ils ont possiblement mangé jadis de la viande de vache).
D’après les Gurungs qui se nomment dans leur langue «Tamu-Mai» (Ta-: haut, -mu: gens), signifiant “montagnards??? (donc venant du nord), “tonnerre du ciel??? (d’où leur caractère militaire), ou “chevalier??? (donc du plateau tibétain où l’utilisation des chevaux était répandue, contrairement au Népal), terme les reliant aux Tamangs et aux Thakalis (qui se nomment les Tamhangs).

Répartition géographique des Gurungs

La moitié de la population Gurung vit dans les collines de la région Ouest (quelques milliers dans la région Centre) du pays:

  • 69 038 dans le district de Kaski (Pokhara),
  • 31 687 dans le district de Syangja (Sud de Pokhara),
  • 8 034 dans le district de Parbat (Kusma, Ouest de Pokhara),
  • 56 140 dans le district de Lamjung (Besisahar, Tour de l’Annapurna),
  • 62 240 dans le district de Gorkha (Gorkha, Tour du Manaslu),
  • 39 418 dans le district de Tanahun (Damauli, Est de Pokhara),
  • 26 224 dans le district de Dhading (Dhading Besi, Ganesh Himal)
  • 7 105 dans le district de Nuwakot (Helambu, Nord de Katmandou)
  • etc …

20% de la population Gurung vit dans le Teraï, résultat d’une migration récente (depuis les années 90) vers des terres plus fertiles et moins accidentées, signe de réussite socio-économique:

19 793 dans le district de Rupandehi,
  • 13 980 dans le district de Nawalparasi,
  • 31 789 dans le district de Chitwan,
  • etc …
  • 15% de la population Gurung vit dans la vallée de Katmandou.

    • résultat d’une migration récente (depuis les années 90) vers des terres plus faciles à vivre, signe de réussite socio-économique.

    5% de la population Gurung éparpillée dans tout le pays à raison de quelques centaines de personnes par district.

    • résultante de migrations professionnelles réussies,
    • résultante de mariages inter ethniques.

    Une personne s’installe sur le lieu de son déplacement professionnel dans un district éloigné et y fait venir ses proches; Une petite communauté se fonde.

    Entre 5 et 10% de la population Gurung vit et travaille à l’étranger.

    Les destinations de choix pour les plus qualifiés ou fortunés sont
    • l’Europe occidentale (Armée en G.B, Industrie, services aux personnes, et métiers divers),
    • les U.S.A (Industrie, services aux personnes, et métiers divers),
    • l’Australie (Industrie, services aux personnes, et métiers divers),
    • Singapour (police, services aux personnes, et métiers divers)

    Les métiers moins qualifiés offrent des perspectives dans les pays suivants: les ouvriers se rendront plutôt en:

    • Inde (tous les petits métiers, souvent dans le gardiennage, l’armée),
    • le Golfe persique (construction immobilière, services de nettoyage, etc…),
    • la Malaisie (services aux personnes),
    • le Moyen-Orient (services aux personnes),
    • Hong Kong (services aux personnes, gardiennage).

    Analyse et répartition linguistique

    +/- 340 000 Gurungs parlent leur langue au Népal, soit 1.23% de la population nationale. Cette langue fait partie du groupe linguistique tibéto-birman et est proche des Manangis, Thakalis et Tamangs.

    • Dans les régions natives: 85% des Gurungs parlent leur langue.
    • Dans les zones de migration: 50% seulement conservent leur langue.

    Ils se subdivisent en divers clans et groupes :

    Les Ghale Gurung

    +/- 40 000, et subdivisés entre :

    Ghale Kutang : +/- 1 500 entre Nyak et Prok dans la Buri Gandaki. Davantage bouddhistes qu’hindous.
    Ghale du Nord : +/- 3 000 entre Khorla Besi et Nyak.
    Ghale du Sud : +/- 28 000 entre Barpak, Laprak et Kyaura.
    principalement dans les districts de Lamjung et de Gorkha.
    94% d’entre eux sont hindous, 5% bouddhistes et 1% chrétiens.
    Les Ghales parlent une langue assez différente, le Daduwa, essentiellement parlé dans les districts de Lamjung et Gorkha.

    Les Gurungs de l’Est ou Gorkhali

    +/- 120 000 principalement dans les districts de Lamjung et de Gorkha, ils vivent entre 1 000 et 2 000 mètres d’altitude sur les contreforts de l’Himalaya.

    Les Gurungs de l’Ouest

    +/- 110 000 dans les districts de Kaski, Syangja et Parbat. Cette langue est aussi parlée en Inde et au Bhoutan, et possiblement en Birmanie (communautés népalaises résidentes). Bonne intelligibilité avec les Gurungs du Sud mais pas avec ceux de l’Est.

    Les Gurungs du Nord

    7 275 dans 7 villages du district de Manang, ils parlent une langue tibétaine qui peut s’apparenter au Manangi.

    Structure sociale des Gurung

    • Le clan des 4 :
    • les Klyes (Ghale en népalais), venant du vieux mot gurung Khle signifiant: Kha=juste et Le=visage), tardifs migrants du Tibet étaient sûrement les 1ers rois. Ils ont, contrairement aux autres Gurungs, un tabou vis-à-vis des viandes de chèvre et poulet. Leurs noms sont Samri, Rilde et Kyalde.
    • les Kwonmas (Ghodane en népalais), auraient été les administrateurs (ou chefs de villages) des rois Ghales. Leurs noms sont Kwon, Lam, Lem.
    • les Lamas auraient suivi la migration des autres clans. Peu parmi eux suivent l’éducation monastique traditionnelle.
    • Les Khros (Lamichane ou Lem) auraient été les percepteurs des rois Ghales, fonction devenue héréditaire.

    Dans le clan des 16, il ne semblerait pas y avoir d’ordre hiérarchique.

    Les Gurungs sont formés à partir des Mhina Kugi ou neuf clans (Lhiege, Kromchhe, Tu, Mhabchhe, Chormi, Tworchhe, Nansi, Rhila, et Yoj). Il y a néanmoins plus de noms que de clans, ce qui tendrait à montrer un grand nombre de clans.

    Les trois sortes de prêtres officiant chez les Gurungs:

    • Le Puchu, détenteur des mythes et légendes (Pe) concernant la tribu.
    • Le Klye-pri (ou Ghyabring), plus proche des Ghales et représentant la tradition Bönpo.
    • Le Lama, de tradition bouddhiste, originellement faisait partie du clan des Kwonmas.

    « Rodi » ou la maison des jeunes

    De rho=laine et dhin=maison.

    Traditionnellement un lieu où jadis les jeunes filles apprenaient à filer et tisser, le Rodi est petit a petit devenu une sorte de club où les jeunes viennent se rencontrer, discuter, mais aussi apprendre à chanter, danser, ou travailler aux champs ensemble, etc.
    L’entrée a lieu aux alentours de 10 ans et jusqu’à 21ans ou jusqu’au mariage pour les filles, sans limite d’âge pour les garçons. L’encadrant enseigne comment résoudre les problèmes sociaux, l’art de raconter les comtes, et comment réaliser festivals et cérémonies.
    De plus le Rodi organise les travaux de semences, de désherbage, et de récoltes…

    Célébration des grandes étapes de la vie Gurung:

    Naissance

    Après la naissance, l’astrologue est consulté, et 3 jours après le nom est donné au nouveau né. Une fille mariée ne peut pas accoucher chez ses parents car le placenta apporte des maladies et considéré comme élément de pollution rituelle. La mère doit se purifier 9 jours après la naissance du bébé. Ce dernier qu’on lave dans du lait ou de l’urine de vache, éléments purificateurs de la culture Gurung et signes de l’influence hindoue.

    Mariage

    Janvier est un mois propice aux mariages chez les Gurungs. Ils pratiquent le mariage maternel inter-cousin (le marié épouse la fille de la sœur de son père), et les jeunes peuvent se rencontrer à l’intérieur du Rodi.
    Dès que son fils a atteint l’âge de 16 ans, le père du marié lui cherche une femme au sein de sa communauté, tout en consultant l’astrologue, qui étudie les thèmes astraux et décide de la date du mariage.
    Le mariage « par enlèvement » est aussi possible, mais le mariage n’est jamais forcé et les mariages d’amour sont de + en + fréquents. Les mariés vivent chez les parents du mari, et ils ne bâtissent qu’à la naissance d’un premier enfant.
    Peu de polygamie et pas de polyandrie.
    Peu de mariages interethniques. Le divorce est accepté, simple et le remariage avec peu de conséquences.

    Décès

    Le décès constaté, une bannière blanche est érigée sur le toit de la maison, afin de guider l’esprit du mort et d’annoncer le deuil. Le corps est assis de force sur une chaise, cérémonies de la part du Lama ou du Klye-pri (danses, mantras), puis on tourne la tête du mort vers la sortie, et enfin le sang d’une chèvre est offert afin de trouver le passage vers le paradis pour le défunt.
    Puis les offrandes nécessaires du châle (karmu) pour une femme et du turban (krigi) pour un homme, sans lesquels ils ne pourraient aller au paradis. Les affaires personnelles du défunt l’accompagnent. Les 3 sortes de funérailles sont la crémation, l’enterrement, et l’immersion dans une rivière (pendant ou après la mousson). Les frères et fils du défunt doivent observer le deuil (pollution) pendant 3, 13 jours ou 6 mois, pendant lesquels ils ne consommeront pas de sel, d’huile, de viande, ni d’alcool. Durant cette période pas de relations sexuelles, pas de participation aux mariages, et pas le droit de porter fleurs ou tika.
    3 jours, 1 ou 3 ans après le décès, Arghun ou Pai, ou conclusion des rites funéraires est célébré pendant 3 jours. Dans l’ordre: Maphutiwa, début d’Arghun (destruction d’un mât de bambou), pacification des mauvais esprits et des déités tutélaires (offrande d’une chèvre). Pla ou rappel du défunt par la confection d’une effigie à son image (danse, musique, chants). Dernier jour, le Pla est béni, un mouton est sacrifié, et le Pla est emporté dans la jungle où il est détruit et va enfin retourner à la terre des ancêtres. Fête avec danses, chants et musique pour célébrer la fin d’Arghun.

    Leurs grandes fêtes sont entre autre

    • le Pud-pude, célébration de l’arrivée du premier fils de la famille par la propitiation des déités tutélaires,
    • Le Ghattu (ou Ghantu), au printemps, danse théâtrale interprétée par de jeunes filles vierges, relatant les exploits de Pasaram (ou Paramasru), ancien roi de Gorkha. La fonction de cette danse est aussi de demander de bonnes récoltes, et d’enseigner aux jeunes filles comment devenir de bonnes épouses et mères,
    • La fête des morts dite de Pae lawa,
    • etc…

    Habillement et ornement

    Les femmes ont le nez percé, résultat de l’influence hindoue. Néanmoins, elles affectionnent le corail (collier portant le nom de Ghalek), trace de leurs origines tibétaines. Leur robe enroulée s’appelle le Fariya. Les hommes portent le Bhoto (veste) et le Jama (kilt).

    Répartition professionnelle

    Les Gurungs sont principalement des cultivateurs, contrairement à leurs cousins du nord, les Manangbas ou Manangis.
    Ils élèvent également des moutons qu’ils emmènent dans les pâturages de haute altitude pendant l’été (mousson) et les ramènent en automne pour une 1ère tonte. Une seconde tonte aura lieu au printemps.
    Une 3ème activité Gurung repose sur le recrutement au sein des forces de sécurité: Police ou Armée nationale, mais aussi au sein des régiments d’élite Gurkha des armées indiennes et britanniques. L’envoi des pensions des anciens Ghurkas enrôlés à travers le monde joue un rôle important dans l’économie Gurung.
    De nombreux soldats de l’armée de Prithvi Narayan Shah (le roi unificateur du Népal au XVIIIe.) étaient Gurungs.

    Restrictions générales, alimentaires, religieuses, etc.

    Les Gurung ne mangent pas de porc.

    Les Héros Gurungs

    Quatre Gurungs reçurent la Victoria Cross durant la seconde guerre mondiale.