Les Manangi
(aussi appelés Manangba, Manangpa, Manangbhot, Manang Gurung, Nyeshangpa)
Ils représentent 0,25 % de la population du Népal, soit +/- 7 000 habitants.
Leurs origines
Comme la plupart des ethnies mongoloïdes du Népal, les Manangi sont arrivés du Nord en traversant les hauts cols himalayens.
Les questions concernant les origines des Manangis tout comme celles de leurs lointains cousins (Gurung, Tamang, Thakali, Loba, etc.) demeurent nombreuses :
Quand, pourquoi et d’où précisément sont-ils arrivés?
Une légende concernant les Manangi raconte qu’à la suite d’une partie de chasse, un groupe de jeunes chasseurs traversa le col du Thorong La et une fois dans la vallée de ce qui est aujourd’hui Manang, planta quelques grains d’orge. Le même groupe revint la saison suivante, les chasseurs trouvèrent des plants d’orge hauts et aux épis dorés et décidèrent de s’installer dans la vallée au pied du Gangapurna.
On rencontre la même légende à propos des habitants de Nar Phu, avec comme point de départ Manang, et comme col le Kang La.
Étymologie du nom Manang
Du sanscrit Man - : / - Ang :/
Les manangi se nomment dans leur langue Nye-shang.
Du tibétain Nye - : / - shang :
Répartition géographique des Manangi
La grande majorité du peuple Manangi se trouve aujourd’hui dans le district de Manang, situé géographiquement dans la région centrale du Népal, le long de la rivière Marsyangdi au Nord-Ouest de la chaine de l’Annapurna, mais placé administrativement dans la « Région de développement Ouest ».
Le district est partagé en trois régions :
- Gyasumdo: La partie basse et la plus à l’Est, dont les limites sont Tal et Chame.,br> - Nar Phu: La région la moins peuplée, la plus isolée et la plus au Nord, dont les limites sont Koto et le Kang La (col à 5322m) séparant les vallées de Nar et de la haute Marsyangdi.
- Nyeshang : La région la plus peuplée et la plus à l’Ouest, dont les limites sont au Sud la chaine de montagnes entre le Tilicho et le Lamjung Himal le long de la Marsyangdi, à l’Ouest du lac Tilicho au col du Thorong La, au Nord la chaine de montagnes entre le Pisang Peak et les Chulu.
Une portion non négligeable (même si non recensée) de la population Manangi a migré vers la vallée de Katmandou, signe d’un statut économique au-dessus de la moyenne nationale.
Analyse et répartition linguistique des Manangi
La langue Manangi fait partie de la famille des langues tibéto-birmanes mais étrangement n’est pas un dialecte du tibétain mais du Gurung Nord (50% de similarité lexicale), ethnie avec laquelle les Manangis partagent une origine commune.
Les Manangis conservent leur langue maternelle (rétention linguistique) même loin de leur région d’origine et maitrisent dans l’ensemble la langue nationale népalaise. Un dialecte du Manangi, le Nar Phu est parlé dans la région du même nom par un peu moins d’un millier d’âmes.
De par leur histoire et leurs liens commerciaux ancestraux avec l’étranger, les Manangis montrent un intérêt particulier pour les langues étrangères en général et pour l’anglais en particulier.
Célébration des grandes étapes de la vie
Naissance :
Les Manangis
Mariage :
Les mariages sont généralement arrangés (promesses entre 8 & 18 ans), endogames et peuvent avoir lieu entre cousins (enfants de frère et sœur), contrairement aux groupes tibétains et Bhotias.
- Rik Chang ‘’le don de bière’’ (la cérémonie de promesses ou fiançailles), par la famille du marié qui vient offrir la bière de la promesse, cérémonie pendant laquelle le prix du mariage (par la famille du marié) ainsi que de la dote (famille de la mariée) sont définis. Cette étape peut avoir lieu 10 ans avant l’emménagement marital … La consommation est néanmoins acceptée et les enfants nés de telles unions sont élevés normalement.
- Chang Dzang Khen ‘’la cérémonie de mariage’’, scelle l’entrée de la mariée dans sa nouvelle famille.
Cette étape a généralement lieu entre 1 et 4 ans après les fiançailles (mais peut avoir lieu 10 ans + tard).
La longueur de cette période d’attente est due au fait que la famille du marié doit fournir une maison (qui coûte l’équivalent de 10 à 12 yaks) au jeune couple. Hors, les parents attendent souvent d’avoir les ressources nécessaires ou un âge avancé avant de remplir leurs responsabilités, auquel cas la maison familiale et ses terres sont laissées au nouveau couple.
Durant cette période d’attente, la femme visite régulièrement son fiancé et le jeune couple peut même consommer son union. Les enfants nés d’une telle union sont élevés chez les grands-parents paternels, et suffisamment grands pour apporter une force de travail quand leurs parents s’installent enfin.
Dans le cas où une famille n’a pas d’enfant male, elle peut accepter le futur gendre (sans fournir de maison) afin de profiter de sa force de travail et ce avant même le mariage prononcé.
Une Manangie réalisant un mariage interethnique sera rejetée du cercle social et ne sera plus bienvenue chez ses parents.
La mariée peut être choisie pendant le festival de Dhanush, qui se déroule au mois de mars.
La polyandrie qui était largement répandue au sein de l’ethnie tend à disparaitre.
Divorces :
Les divorces (les mariages étant issus d’alliances claniques) ne sont pas rares, et les couples, souvent séparés pendant de longues périodes, se défont sans cérémonie spéciale. La moitié des dépenses engagées lors du mariage (fiançailles ou mariage, préparation ou dote) sont rendues à la partie laisée.
Funérailles :
4 sortes de funérailles accompagnées de pujas, de récitations de mantras, et d’offrandes :
- Funérailles de la terre : Le corps est enterré près d’une rivière (impossible pendant les grands froids hivernaux, le sol étant gelé en profondeur), cela concerne les enfants de moins de 8 ans.
- Funérailles de l’eau : Le corps est jeté dans une rivière (gonflée par les eaux de la mousson donc entre Juin et Septembre),
- Funérailles du ciel : Le corps est plié dans la position du fœtus et placé dans un dhoko pour être emporté jusqu'à l’endroit propice pour le démembrement. Chants et trompes servent à convier le ‘’Roi des vautours’’. Les « bouchers » sont choisis à tour de rôle à Manang, alors que souvent dans le monde tibétain, cette besogne est réservée à des personnes de basse extraction.
La découpe commence par les oreilles (bijoux et vêtements sont partagés entre les bouchers), et se termine par les entrailles. Le tout, dispersé en rond autour du site.
Les vautours arrivent rapidement pour une personne dont la vie fut juste, mais tardivement dans le cas contraire. S’ils ne viennent pas, le corps est enterré.
Corbeaux, choucas et vautours sont généralement du festin. Les Gypaètes attendant leur tour pour se délecter de la moelle des os.
- Funérailles du feu : Le corps est incinéré sur un bucher (compliqué dans les régions pauvres en bois, comme Nar Phu).
Leurs grandes fêtes sont entre autres … :
METHA
Festival durant un mois au mois de février-mars, comprenant la compétition Dhanush.
DANUSH
Compétition de tir à l’arc durant une semaine au mois de mars, pendant laquelle les participants visent un portrait du mal. Le défi est d’autant plus grand que les participants sont rarement à jeun !! Le gagnant reçoit une somme d’argent prédéfinie par la communauté.
Une amende de 1 000 Rs à tous ceux qui ne participent pas à la compétition a été instaurée en 2002 afin de lutter contre le désintérêt de la nouvelle génération envers les traditions.
Les futurs époux se choisissent fréquemment pendant cet événement.
LOSAR
Le Nouvel An tibétain, célébré au Népal à l’occasion de la nouvelle Lune du mois de Février, dans toutes les communautés tibétaines mais aussi parmi la plupart des groupes ethniques d’origine tibétaine: Manangi, Manangi, Thak, Loba, Tamang, Gurung, etc …
C’est l’occasion pour les bouddhistes tibétains de se réunir en famille et de s’offrir cadeaux et présents au cours de somptueux repas de fête.
Dans les gompas, les lamas performent des rituels spécifiques après avoir nettoyé (et parfois repeint) leur monastère de fond en comble.
Dès deux jours avant la nouvelle lune, les lamas, masqués et costumés effectuent des circumambulations autour des Stupas de la vallée de Katmandou, tout en portant images et effigies symbolisant l’année passée et ses négativités. A Swayambhunath, ces effigies sont brulées en grande pompe au ‘’col’’ séparant les deux collines. Le lama principal lance ensuite une poignée de tsampa (farine d’orge grillé) dans les quatre directions afin d’accueillir la nouvelle année.
Le quatrième jour après la nouvelle lune, les lamas organisent en l’honneur du Dalaï Lama une procession qui va durer du matin au soir. Son portrait est porté à la tête du cortège jusqu’aux marches du Stupa (Swayambhunath), où attendent d’énormes chaudrons destinés à recevoir les feux rituels de genévriers.
Les trompes télescopiques (Radung), les cymbales (Rolmo), les hautbois rituels (Djaling) et autres gongs accompagnent la procession qui se rassemble à mi-chemin. La foule imite les gestes du lama principal et se joint à lui pour un lancer général de tsampa dans l’air afin de se propitier les déités en vue de l’année à venir. La cérémonie très colorée se déroule dans l’hilarité générale et bien que remplie de sens, sans aucune trace de solennité.
La population bouddhiste assistant à ces cérémonies accentue encore l’aspect photogénique du rituel : les plus beaux costumes sont de sortie et relevés des bijoux les plus précieux (colliers de turquoises, corail, ambre et lapis, en or et assortis de perles) alors que les anciens font tourner leurs moulins à prières (Mani Khorlo ou Korten).
Au mois de Mai, les semences une fois terminées, un festival de 3 jours
(danses masquées, chants, récitations, confection et destruction de Tormas) a lieu afin de propicier les déités et repousser les démons pour les mois à venir.
Structure religieuse des Manangi
Les Manangi appartiennent à l’ancienne école du Bouddhisme tibétain, l’école Nyingma. Les nones et moines font donc partie du clergé marié et il n’est pas rare de trouver des lignées de lamas responsables de monastères de pères en fils (comme ce fut le cas par exemple à Nar).
Un homme de plus de 15 ans peut recevoir une formation de base au Gompa principal du village, en automne, et y apprendre comment préparer les offrandes, l’autel, comment conduire les rites liturgiques de longue vie, de bonne santé, de bénédictions matérielles, et surtout comment réciter les textes sacrés tibétains.
Il devient alors « Chopa », homme de religion.
Structure sociale des Manangi
A Nye-shang, les « clans des 4 » considérés supérieurs et « clans des 16 » considérés inferieurs, existent comme chez les Gurung.
A Nar Phu, existent 4 clans inégaux en droits et devoirs et qui reflètent possiblement l’ordre d’arrivée des groupes d’immigrants successifs.
Le village typique Manangi comprend :
- Le chef de villages ou Dhawa : élu pour 2 ans non reconductibles, il devient ensuite Sherpa. Le Dhawa doit être un homme né au village.
- Un policier ou Sherpa : assistant du chef de village,
- Un représentant du chef du village Katuwal : communique à la population les nouveaux décrets.
- Gardiens des champs : 3 hommes, responsables de maintenir le respect de propriété des champs (pas d’empiètement des uns sur les autres) et la répartition de l’eau.
- Gardiens des prix : 6 hommes, responsables de maintenir abordable le prix du chang, du bois, du sel, des œufs, etc. et d’éviter tout monopole et montée non régulée des prix.
- Gardiens du rite : 2 hommes, responsables de la discipline du et dans le Gumba (ils peuvent pour cela imposer des amendes à ceux qui se présentent saouls aux cérémonies), de la présence des villageois aux cérémonies importantes, de la paye des taxes religieuses par tous.
Les + de 60 ans n’ont pas le droit d’assister aux réunions de villages, sous peine d’amende.
Restrictions et particularités générales, alimentaires, religieuses, etc … Privilèges
Depuis 1784, les Manangba ont reçu par le roi Rana Bahadur Shah, des droits spéciaux les exonérant de taxes sur le commerce transfrontalier, et ce grâce à leur soutien à ce dernier au cours d’une guerre locale.
Ils reçurent au XXème siècle par le roi Mahendra Bikram Shah, le privilège de recevoir un passeport et de voyager à l’étranger à une période de restriction de mouvements pour le reste de la population.
Ils font aujourd’hui du commerce principalement avec HongKong, Singapour, le Japon et la Thaïlande, et possèdent des quasi monopoles sur l’importation de pierres semi-precieuses (corail, ambre, turquoise, zi, etc).
C’est en grande partie la raison de l’abandon partiel de l’élevage des habitants de Nye-Shang, qui achètent aujourd’hui leurs yaks aux habitants de Nar Phu, avec lesquels ils entretiennent des liens commerciaux ancestraux.
Alimentation
L’alimentation traditionnelle Manangi est composée de patates, d’orge, de blé et de sarrazin, cultivés mais en quantité insuffisante pour nourrir la population 12 mois de l’année.
La consommation de riz dans la société Manangi s’est développée dans les 60-70, résultante d’interactions toujours plus nombreuses avec le monde extérieur (népalais des collines et touristes) mais aussi reflet de l’ascension économique en découlant.
Chasse
Les Manangi, au contraire des bouddhistes en général
Les Héros Manangi
Le peuple Manangi s’est révélé au travers du commerce, et même si leurs villages se trouvent aux pieds des plus belles montagnes de la planète, ils n’ont jamais vraiment participé à la conquête de l’Himalaya ni même au développement du trekking.